gas-poches-400Série « Chefs d’entreprise » : Georges-Antoine Strauch

Interview de Georges-Antoine Strauch, docteur en économie, informaticien et PDG d’Articque, PME du secteur de la cartographie, qu’il a fondée en 1989.

Quel est le métier d’Articque ?

Georges-Antoine Strauch : « Articque est promoteur du Système d’Analyse Géographique (SAG), combinaison de la cartographie et des statistiques. Articque offre ainsi aux entreprises une colonne vertébrale informatique aux informations de l’entreprise ou des collectivités facilement exploitables au travers de cartes/tableaux de bord. En pleine croissance, notre société compte aujourd’hui 28 salariés« .

Dans quel contexte avez-vous fondé Articque ?

Georges-Antoine Strauch : « Tout commence en juin 1984 lorsque je croise un Macintosh d’Apple à Rennes, je deviens développeur en contactant avec Jean-Louis Gassée, futur dirigeant d’Apple. Étudiant universitaire, spécialiste des PME, je fonde Mondial Novation. Pour présenter ma thèse en 1986, je la vends à Oried Informatique. Ma thèse en poche, je créé Optimum Études qui travaillait sur l’optimisation sous contraintes d’environnement. Après mes rencontres décisives avec Steve Jobs en 1992 et avec Jérôme Barthélémy qui travaille sur un outil de cartographie, je décide la création d’Articque en 1989″.

Pourquoi le nom Articque ?

Georges-Antoine Strauch : « Le nom Articque a été créé par Olivier Thillay en 1988. Il signifie faire son métier avec Art dans tous les domaines en Tique. Plus largement, il illustre notre volonté de faire notre métier avec art dans tous les secteurs en « tique », dans un souci d’économie et d’éthique, et une forme à l’aspect très « pur » sans virus, comme l’Arctique, la terre de glace du même nom ».

Quel mobile vous a poussé à créer un logiciel de cartographie ?

Georges-Antoine Strauch : « En faisant ma thèse sur l’industrie régionale, j’avais eu l’idée d’un logiciel de cartographie. J’ai croisé Jérôme Barthélémy qui était en train d’en développer un en 1989 ! Nous avons lancé le logiciel Cartes & Données sur Macintosh en 1994. avec le soutien de l’ANVAR, nous avons mis quatre ans à industrialiser le logiciel, pourtant présenté en 1991 sur NeXT.

Ce logiciel de cartographie statistique offre aux utilisateurs la possibilité d’intégrer des données chiffrées à des cartes géographiques. En quelques clics, ce logiciel vous apporte toute la puissance de communication de la cartographie décisionnelle (études géomarketing, typologies statistiques, scoring spatial, zone de chalandise, business intelligence, reporting cartographique).

Cartes & Données contient tout le savoir-faire Articque et l’Organigramme est le cœur de Cartes & Données. Il décrit graphiquement votre pensée et le problème énoncé. Chaque fonction du logiciel correspond à un module visualisé par un icône. Vous pensez votre carte tout en réalisant votre carte qui peut ainsi, influencer votre raisonnement au fur et à mesure du déroulement du processus. Véritable phrase graphique expliquant le travail réalisé, vous pouvez à tout moment revenir sur votre choix ».

Quel est le facteur déclenchant de votre croissance exponentielle ?

Georges-Antoine Strauch : « Le Web, bien entendu ! Nous avions eu l’idée dès 1991 du réseau partageant données et applications (RNIS-NUMERIS). C’est l’explosion du web qui nous a vraiment fait décoller et la reconnaissance européenne. En 1996, la Commission Européenne sélectionne Daedalus parmi 500 projets européens. Le consortium international dirigé par Articque se propose de mettre à disposition cartes, données et logiciels en ligne ! C’est le site makeyourmap qui est toujours en ligne à ce jour.

Toujours sur le web, Articque se fait aussi remarquer par le grand public à cause d’un coup de colère en 1999 ; l’Erika sombre et souille nos côtes. Le Breton que je suis « a fait » comme on dit là-bas, l’Amoco, le Tanio… Je n’ai pas oublié et veut faire quelque chose ; avec Riccardo Cohen, nous mettons en ligne en quelques heures avant Noël les Vigies du Littoral qui ont permis aux communes et aux volontaires de communiquer entre eux et au public. C’est un succès et la couverture presse est impressionnante (TF1, Les Echos, La Tribune, Ouest-France…).

Des relations de confiance et de respect sont nouées avec des personnalités qui comptent aujourd’hui (Alain Lipietz, Nathalie Kosciusko-Morizet, François Bayrou… ). Du coup, et sans pourtant avoir eu cet objectif, Articque remporte le premier prix des ElecTrophées pour les services aux entreprises en 1999 !

Articque lance ensuite France Électorale, base de données intelligente sur la carte électorale, les élus et les élections de 1988 à 1998. Aux municipales de 2001, FranceElectorale.com est consacré meilleur site de couverture communale des élections municipales par toute la presse spécialisée.

Enfin Articque signe la fabrication d’un suivi de 5 millions de porteurs de cartes de fidélité pour 5000 directeurs de magasins d’un groupe multinational. Plus étonnant, la CFE-CGC utilise dès 2000 la cartographie comme colonne vertébrale de son observatoire des entreprises françaises et comme outil de conquête pour les élections prud’hommales de 2002.

Le programme GeoinitiativeEmploi.com lancé en 2006, permet aux demandeurs d’emploi d’accéder gratuitement pendant un an à une licence Cartes & Données ainsi qu’à de nombreuses données associées. Ils peuvent également s’inscrire aux formations proposées.

Je poursuis ma stratégie de croissance par adjacence et acquiert en 2007 la société Géobs à Nantes, un achat qui engendre l’offre la plus complète du marché de la cartographie statistique et décisionnelle. Spécialiste de MapInfo, le code récupéré permet de monter rapidement une offre commune avec Pitney Bowes MapInfo et les logiciels OptiSecto® et OptiTypo®.

Aujourd’hui, Articque affiche de prestigieuses références comme le Ministère de la Défense, Airbus, Air Liquide, MMA, Securitest, la Cité de la Musique, la SNCF, la CFE CGC, EDF… Pour fêter nos 20 ans, nous avons rassemblé le 30 janvier 2009 près de 200 personnes, clients et experts pour développer des réflexions sur l’usage des statistiques et des mathématiques en cartographie, autour de conférences plénières et de consultations personnalisées. Les perspectives de cette année sont nombreuses que ce soit autour des atouts traditionnels d’Articque ou du lancement d’une innovation sur le marché américain. »

Quelles sont vos forces ?

Georges-Antoine Strauch : « La démarche d’innovation et la solidité financière d’Articque ont su convaincre les meilleurs soutiens depuis sa création en 1989 que ce soit les chercheurs cartographes du GIP Reclus ou le soutien financier d’Oséo ANVAR, de la Région Centre et du département d’Indre-et-Loire comme celui de la Communauté Européenne (Label Info 2000). Nous avons fait de l’innovation l’un des fondamentaux de l’entreprise. Anticipant une crise économique en 2006, nous nous sommes préparés en faisant de l’innovation notre priorité, ce qui nous permet aujourd’hui de ne pas trop souffrir de la conjoncture et d’être en bonne santé économique. Mais au bout du compte, ce sont les principes quotidiens de l’entreprise et de l’équipe de salariés qui permettent à Articque de prendre cette position enviable ».

Quelles sont vos faiblesses ?

Georges-Antoine Strauch : « Nous n’avons pas encore, après 20 ans d’existence, de force commerciale de terrain. Nous avons un commercial depuis un an et nous menons 2 nouveaux recrutements cette année ».

Comment définissez-vous votre entreprise en tant fournisseur de solutions décisionnelles?

Georges-Antoine Strauch : « L’objectivité, l’éthique et la rigueur professionnelle sont pour moi des caractéristiques incontournables dont l’entreprise doit se doter afin d’offrir des services et des solutions qui sont à la hauteur des attentes de ses clients. »

Comment expliquez-vous cette bonne santé dans le contexte économique difficile d’aujourd’hui ?

Georges-Antoine Strauch : « Cela s’explique par la valeur ajoutée apportée par nos produits et par leur positionnement concurrentiel très compétitif. Le juste prix, toujours pratiqué par Articque, prend tout son sens en période.

De plus, le fait de le prévoir depuis trois ans nous permet d’avoir déjà pris les mesures nécessaires en 2007 et 2008 qui ont été des années d’investissements malgré les bons résultats financiers. »

Est-ce que vous ressentez un ralentissement pour la demande de vos services en cette période de crise économique?

Georges-Antoine Strauch : « En période de crise, la demande reste forte d’outils de suivi et d’anticipation. Les zones de gains de productivité potentielle non exploitées et les territoires mal exploités ont plus qu’une faute en période de difficultés, ce sont des crimes contre l’entreprise. Les entreprises privées et organismes publics ont particulièrement besoin d’outils pour piloter des changements, prendre les décisions pertinentes et suivre les plans d’action, le géo-décisionnel est un atout clé et nos clients ne s’y trompent pas ».

Que pensez-vous de la crise ?

Georges-Antoine Strauch : « La crise financière actuelle amène son lot de difficultés mais génère aussi de belles opportunités industrielles. Ainsi après avoir repris Geobs à Nantes en 2007 et créé Atmo’Expert en 2008 à Tours, nous avons répondu à l’appel de nos confrères d’Intercarto à Rouen en reprenant l’activité et en relançant l’entreprise depuis quelques semaines avec un programme d’investissement de plusieurs dizaines de milliers d’euros ».

Pour conclure, pouvez-vous expliquer vos motivations concernant votre décision de vous lancer sur le marché américain?

Georges-Antoine Strauch : « 60% des dépenses mondiales en informatique se font aux États-Unis et les premiers échos montrent un accueil très favorable à nos technologies. En effet, des géographes américains, les Docteurs Kazimierz J. Zaniewski et Mamadou Coulibaly de l’université de Wisconsin Oshkosh, ont tout récemment présenté Cartes & Données lors du congrès annuel de l’AAG (Congrès Mondial de Géographes) de Las Vegas au mois de mars 2009. Ils avaient découvert ce logiciel grâce à Geocampus.

Enfin, nous lançons dans les prochains jours un nouveau produit de bureautique qui se prête bien à la clientèle américaine puisqu’il épouse Microsoft Excel qui fait partie intégrante de la culture des professionnels outre atlantique. De plus, il s’agit d’un challenge collectif pour nos équipes que de proposer un nouveau produit sur ce marché déjà très fortement concurrentiel et exigeant. À suivre… très bientôt… »